Descartes et la culture des esprits

On peut décrire la philosophie de Descartes comme poursuivant deux objectifs : le premier, procéder à une culture de l’esprit grâce à la méthode ; le second, parvenir à un accord entre les esprits sur la nouvelle image scientifique du monde grâce à la méta physique. Passer d’un bon sens naïf – « chose du monde la mieux partagée », s’incarnant dans certaines manières ordinaires de penser, de sentir et d’agir (chez l’artisan ou le paysan, par exemple) – à un bon sens cultivé – cette disposition acquise au moyen de laquelle un sujet devient maître de ses pensées et apte à résoudre des questions de tout ordre – tel sera donc le premier objectif. Procéder à une critique de l’image naïve, préscientifique, du monde, pour fabriquer un nouveau sens commun qui reconnaisse les conquêtes de la science nouvelle, tel sera donc le second objectif. Par où la raison cartésienne, sans rien épargner de nos préjugés et sans, pour autant, jamais dédaigner l’étude des pratiques intellectuelles les plus communes, s’adresse à tous les esprits. Sa tâche historique est donc claire : faire emprunter au sens commun le chemin de la modernité.

Louis Rouquayrol, agrégé de philosophie, est docteur des universités Paris 1 Panthéon-Sorbonne et Ca’Foscari de Venise. Il est actuellement postdoctorant au CNRS.