Séminaire Hegel et l’idéalisme allemand
Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne
HIPHIMO
Thème de l’année :
Concevoir la liberté. Hegel et l’avènement d’un concept
La liberté est un concept clé de la philosophie kantienne et post-kantienne. Kant fonde sa philosophie pratique sur cette notion tout en attribuant à la raison pratique le premier rang parmi les « facultés de l’âme ». Schelling y voit carrément la « chose en soi », celle qui seule vaut la peine, en dernière conséquence, d’être connue et que Kat n’aurait fait qu’entrevoir (Freiheitsschrift). Pour Fichte, la pratique de la Wissenschaftslehre est pur exercice de liberté, comme il ressort de plus en plus des écrits tardifs. Hegel enfin fonde sa conception du droit sur l’idée de liberté et sa réalisation. Tout cela est bien connu et étudié. Mais savons-nous vraiment pourquoi cette génération de contemporains de la grande révolution française a tant convoité le concept de liberté ; et surtout, savons-nous vraiment ce qu’ils ont entendu par là ?
Pour Hegel, dit-on, la liberté est l’être près de soi dans l’autre (Bei sich Sein im Anderen) . Or, il n’est pas sûr qu’il s’agisse là d’une définition de la liberté. Il est sans doute plus prudent de dire qu’à chaque fois que nous constatons un être auprès de soi dans l’autre, on constate aussi une forme de liberté. Le terme « liberté » se réfère d’une façon différente à la chose qu’il dénomme que le terme « Être auprès de soi dans l’autre ». La façon dont un terme désigne son corrélat n’est pas indifférent à la nature de ce corrélat ou de cette « réalité ». Si nous acceptons pour un instant cette différence entre la liberté et l’être auprès de soi dans l’autre, il devient possible de poser la question que voici : Pourquoi et dans quel sens la liberté se produit-elle à chaque fois qu’une chose est auprès de soi dans l’autre ? Pour pouvoir répondre à cette question, il faudrait pouvoir parler de la liberté sans avoir recours d’emblée à sa prétendue définition.
Si l’interprétation traditionnelle de Hegel et de sa conception de la liberté s’est focalisée sur sa philosophie du droit, de l’éthicité, de la politique, il semble nécessaire dorénavant de se pencher aussi sur d’autres textes et d’autres parties du « système » dans lesquelles il est bien question de liberté afin de mieux cerner les ressorts plus profonds qui régissent l’usage de ce concept et le désir de le mettre autant en avant. Ainsi, la théorie de l’esprit absolu semble regorger d’endroits où la notion de liberté est engagée : L’art n’est-il pas structurellement « libre » du fait de porter son but en lui-même ? D’où : quel rapport entre les institutions de l’esprit absolu et les institutions de l’esprit objectif ? Puis : Peut-on penser la divinité sans recours au concept de liberté ? Que penser de la nature, issue d’un Ent-schluß (dé-cision) de l’idée, dont Hegel précise qu’il est libre ? (Simple pensée créationniste ou philosophème sérieux encore à assimiler ?) Quel statut accorder à la liberté dans le concert des concepts de la modalité logique ? Comment penser la liberté qu’il faut bien attribuer à l’absolu ? Suffit-il de dire que l’absolu est auprès de soi dans l’autre ?
Pour aborder ces questions, qui semblent d’abord concerner l’interprétation interne de différentes parties du système hégélien, il nous semble essentiel de confronter les interventions théoriques de Hegel avec d’autres points émergeants du discours sur la liberté, tel qu’il apparaît autour de la figure de Kant et de la grande révolution, ainsi que les tentatives critiques qui les ont accompagnés et suivis.
(1)Voir par exemple l’article très complet de Hans Friedrich Fulda : „Der eine Begriff als das Freie und die Manifestationen der Freiheit des Geistes“, in: Anton Friedrich Koch, Friederike Schick, Klaus Vieweg, Claudia Wirsing (Hg.), Hegel – 200 Jahre Wissenschaft der Logik, Hamburg: Meiner, 2014, p. 15-40
INSCRIPTION OBLIGATOIRE : gilles.marmasse@univ-poitiers.fr
samedi 15 octobre 2022
Gauthier Tumpich (université Montpellier 3) : "La volonté de liberté comprise comme dépassement dialectique de la volonté de bonheur"
Bruno Haas (université Paris 1 Panthéon-Sorbonne) : "Liberté l’absolu"
samedi 10 décembre 2022
Mai Lequan (université Lyon 3-Jean-Moulin) : "Liberté transcendantale et liberté pratique selon Kant : de la spontanéité à l'autonomie et retour"
Jean-Christophe Goddard (université Toulouse Jean-Jaurès) : "Liberté transcendantale kantienne et cosmologie "transcendantaliste" (au sens de M.Sahlins). Une lecture anthropologique de Kant"
samedi 28 janvier 2023
Alberto Siani (université de Pise) : "Ende der Kunst, Freiheit des Subjekts"
Camilla Brenni (Centre Marc Bloch) : « L’empirisme philosophique selon Hegel : une doctrine de la non-liberté ? »
samedi 18 mars 2023
Denis Thouard (CNRS) : "Sur Schleiermacher et la liberté"
Christoph Martin (université de Stuttgart) : "Objectivité et Liberté"